« La vérité, et rien que la vérité ».
Bismillahi-Arrahmani-Arrahim
Louange à Allah seul. Bénédiction et salut soient sur le sceau des prophètes, sur sa famille et ses compagnons et ceux qui les auront bien suivi. Mon frère, avec ton air malicieux, tu m’affubles du qualificatif de séparatiste. Matin et soir, tu chantes ce refrain en boucles, risquant de t’asphyxier. Et le ridicule finira par te blesser. Je ne t’ai pourtant jamais entendu traiter de séparatistes, nos frères originaires de Mtsambountsini. Eux qui, depuis très longtemps, à Paris comme à Marseille, se sont toujours réunis sans intrus. Tu le savais n’est-ce pas ! Au lieu de t’égosiller et de verser quotidiennement dans la palabre insipide et stérile, tu ferais donc mieux de canaliser ton énergie pour l’user dans les efforts de réhabilitations de notre très chère ville. Peu m’importe avec qui tu t’associes, ou dans quel quartier tu veux les réaliser. C’est ta liberté !
Peu m’importe également la dimension de l’œuvre. Un petit galet ou une dalle ; un petit sentier ou une « autoroute » … comme tu le veux ou comme tu le peux. En tout cas, ce sera toujours fait dans un des quartiers d’Ikoni. Au final, tu fais beaucoup de discours, mais avec peu d’actes positifs aux fruits palpables. Cher frère, l’union est un idéal noble auquel j’adhère moi aussi. Mais la réalité universelle est toute autre. Divers partis, des courants dans un même parti et même des clubs dans un même courant. Ainsi va le monde. Ce n’est pas la diversité qui est condamnable. C’est plutôt l’animosité qui règne chez certains qu’il faut extirper. Faisons-nous la concurrence dans les bonnes actions et non dans les destructions : « A chacun une direction vers laquelle il s’oriente pour accomplir sa prière ! Mais l’essentiel est de chercher à vous surpasser les uns les autres dans l’accomplissement du bien… » (Sourate 2, V148) Moi, je dis plutôt un grand merci à tous nos frères sur les terrains, à Ikoni, qui s’échinent dans toutes les actions de restauration de nos lieux de vie afin d’améliorer au moins « l’état esthétique » de notre ville.
Certes, un moment viendra où certains projets nécessiteraient la conjugaison des actions de toutes les forces vives de notre ville. Ce n’est pas nouveau chez nous, n’est ce pas ! Notre mosquée de vendredi a bien été conçue collégialement et réalisée par des participations financières séparées et variées de nos quartiers… Nous sommes capables d’intelligence quand il faut ! Au fait, où sont les érudits de Mtsambounstini? Je ne veux pas du tout insinuer ici qu’ils approuvent les atrocités commises dans notre ville ! J’attends seulement un silence assourdissant de leur part. J’entends seulement un silence assourdissant de leur part. Aujourd’hui en tout cas, moi, j’abandonne volontiers mes habits du « Mdrwantsi » doté d’urbanité et de sympathie communicante. Oui, j’en ai assez de recevoir des gifles venant toujours des mêmes gredins, des mêmes incendiaires et des mêmes scélérats. Chaque fois que je passe l’éponge, le surlendemain ils récidivent. Te rappelles-tu du 16 août 1996 ? Un meurtre au « Founihaziri ». Heureusement que cette fois-ci, en décembre 2013, quoiqu’ atroces, les dégâts ne furent que matériels ! Il y a eu néanmoins un « meurtre symbolique » : la destruction de la plaque commémorant l’assassinat de 1996. Parce qu’ils ne veulent pas qu’il reste une trace pour la mémoire ! Or sache que « parce qu’un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir »
Cependant, si j’avais le pouvoir d’oublier, j’oublierais. Bien que mon chagrin soit encore vif : « Telle est la vie des hommes. Quelques joies très vite effacées par d’inoubliables chagrins ». Pourtant, je ne désire nullement pas me venger. Rassure-toi, je reste sans haine ni rancoeur. Cela consume le cœur. En effet, mes « foundis » m’ont toujours mis en garde contre ces grands maux. Ainsi, je voudrais pardonner. Sachant que le pardon n’est toutefois pas une obligation imposée par notre Seigneur. C’est seulement une recommandation, donc un libre choix laissé à la victime. La règle générale étant l’application de la loi. Il est vrai qu’une mascarade de procès a eu lieu. Des petites mains sont inculpées et écrouées. Mais les « cerveaux » qui ont commandité ces atrocités ont été épargnés. Ce n’est pas surprenant pour quiconque connaît le fonctionnement de nos juridictions ! Mais toi mon frère matamore, ton attitude me déçoit. Est-ce par crainte de représailles, par solidarité familiale ou par intérêts que tu n’oses pas critiquer et dénoncer ces « cerveaux »! Tu deviens alors l’acolyte de ces agresseurs. En revanche, tu es très bien à l’aise et prompt pour t’en prendre à moi, la docile victime. Le comble de l’hypocrisie, c’est quand tu me parles de Dieu. De quel Dieu parles-tu d’ailleurs ? Car celui à qui je crois, Dit : « …Ceux qui répondent à l’offense quand ils en sont victimes, sans oublier que la riposte doit être égale à l’offense subie ; et que celui qui pardonne et se montre conciliant trouvera sa récompense auprès du Seigneur, car Dieu n’aime pas les agresseurs. Mais ceux qui répondent à une injustice dont ils ont été victimes n’encourent aucune peine. En revanche, sont punissables ceux qui oppriment leurs semblables, et qui, sans souci d’équité sèment le mal sur la Terre. A ceux-là, un châtiment douloureux est réservé. C’est un signe d’une grande sagesse que de faire preuve de patience et de clémence. » (Sourate 42, V 39-43)
Par ailleurs, penses-tu que ce Dieu est satisfait de ceux qui ont incendié la maison de notre foundi Soulé Mouigni Halouwa ? Les malfaiteurs n’ignoraient sûrement pas que c’était une « maison bibliothèque religieuse », garnie de Corans ainsi que d’une pléthore de manuscrits et cahiers islamiques. Et tout est réduit en cendres. Que des cendres. ! Des cendres. (Ce n’est là qu’une illustration d’un de nombreux lieux sinistrés ; j’aurais pu citer d’autres maisons et véhicules qui ont subi le même sort) : « … Que la malédiction de Dieu frappe les injustes » (Sourate11, V18) Je voudrais pardonner. Tout en sachant que « si l’on est d’une tolérance absolue, même envers les intolérants, et que l’on ne défende pas la société tolérante contre les assauts, les tolérants seront anéantis et avec eux la tolérance » Mais qui dois-je pardonner ? Personne n’a fait son Mea Culpa, et personne ne m’a demandé pardon. Or c’est par la vérité que naîtra la véritable réconciliation qui pacifierait enfin notre cité. Allah nous dit : «… Réconciliez les avec justice et impartialité, car Dieu aime les gens équitables » (sourate 49 verset 9) Et nous parviendrons enfin à vivre ensemble convenablement comme des frères avec nos différences, car Ikoni est une et indivisible, mais n’est pas uniforme. Que les insensés manifestent leur repentir et ma plaie béante commencera à cicatriser! En attendant, je te laisse prêcher la bonne parole auprès des tiens. Moi, je continue ma route avec les miens (les wadrantsi & associés).Je partage paisiblement mes joies socioculturelles et coutumières avec eux, en savourant nos « maelé ya nazi et le ntibé ».
In-challwah un jour nous nous unirons. Qu’Allah nous guide et fasse de nos enfants une descendance pieuse qui L’adorera et suivra les enseignements du Prophète swalla-Allwahou anlayihi wa sallam !
Paris, le 13 février 2014.
Mohamed Soulaïmana Mouigni